De la toiture des pays tropicaux

Adopter la toiture comme la cinquième façade du bâti, c’est la hisser à un titre de noblesse !

Nos yeux sont avertis par ce qui se montre devant eux : le paysage, le ciel, le soleil, la lune, les voitures, les constructions, les gens, les animaux…
La pensée occidentale est une pensée qui raisonne. Cette faculté lui donne accès à la face cachée de ce que l’on voit. Si l’ingénieur de structure nous recommande de ne pas économiser en ce qui concerne l’infrastructure d’une construction (les fondations, les niveaux enterrés), l’architecte nous recommande de rechercher l’harmonie en ce qui concerne la superstructure (le volume, la surface, la modénature), le visible. Le bien-être, la paix, la guérison, sont des concepts qui dépendent essentiellement de l’architecture, dirons-nous. Et ce, autant de l’intérieur que de l’extérieur. Pour l’heure, dans cet article, nous bornerons notre propos à ne considérer que l’apparence extérieure, le volume, le donné à voir. Plus particulièrement, du couronnement de l’architecture : j’ai nommé la toiture.

Pour la majorité, cette cime se traduit par un triangle, figure de la toiture en pente. Sous nos latitudes où l’échelle des constructions est dans des proportions 1/3 pour 2/3 entre toiture et corps de bâtiment, l’on dénote une tristesse dans le toit pentu, et ce, depuis les travaux du BAUHAUSS d’après la seconde guerre mondiale.
Si l’architecture moderne a largement utilisé le toit plat, le toit terrasse, la sphère, le prisme ; force est de constater que tout toit plat ne décline pas un volume architectural plaisant.
Il faut entre autre l’harmonie, c’est-à-dire, la recherche des proportions, de la variété, de la régularité, de la symétrie, du rythme. La recherche en architecture comme pour les mathématiques (l’algèbre, la géométrie), n’est pas considérée par la plupart des personnes.

Résidence REFLET DES ISLES (2009). Quartier Sainte-Thérése, Fort-de-France. ARTEMIA PROMOTION. SETIM CARAIBE.

Quand nous consultons un architecte, nous considérons premièrement le désir égoïste de réaliser une œuvre qui répondra à notre envie.
Il est paradoxal de se rendre à l’évidence : nous ne considérons pas l’intégration de notre architecture dans le site qui l’accueille.
Pour pallier à ce deuil sur l’insertion, des règlements d’urbanisme SDAU, SAR, PLU, régissent les conditions de prise en compte de la charge d’impact de la future architecture. Si la loi ALUR a supprimé le COS (Coefficient d’Occupation Des Sols), dans les villes et communes dotées d’un PLU ; c’est bien pour que le gabarit soit valorisé.

Forts de ce constat, nous devrions, à défaut de résurgences paternalistes ou traditionalistes, nous tourner vers une recherche. Celle-ci consiste à englober du savoir dans le traitement de l’architecture et plus particulièrement de la toiture qui nous intéresse. Nous rejetons le labeur rébarbatif qui se concrétise par une fuite en avant technologique. Nous connaissons sa difficulté économique et son désaveu du développement durable en matière de maintenance réactive.

Prônons l’imagination qui nous permet de réaliser un plan. Elle se positionne du côté du savoir (l’architecture), tout en digérant le côté du plaisir (l’art). Oublions les « cases », les « villas créoles », Les « barres », les tours et les cathédrales, pour une tabula rasa tropicale. Considérer le passé qui a fuit ; partir du réel qui nous commande de privilégier le volet économique en ce début de XXIème siècle, non pour se diriger vers le bas où se trouvent découragement et résignation, mais pour faire éclater les barrières et instaurer des « ponts » inter générationnels.

Adopter la toiture comme la cinquième façade du bâti, c’est la hisser à un titre de noblesse.
C’est elle qui accueille les cellules photovoltaïques pour la production d’électricité et les panneaux solaires de chauffe-eau. C’est elle qui permet l’aération haute, car nous savons que l’air chaud monte. C’est elle qui originellement nous protège du soleil et des cyclones. C’est elle qui reçoit les éléments secondaires de superstructure (antennes et autres paraboles, machinerie d’ascenseurs).
Proposons une alternative aux deux, trois ou quatre pans : le pan incliné. Il part des acquis de l’architecture moderne avec le toit terrasse avec acrotère. Son inclinaison vers la façade principale en point haut du bâtiment, amène de la gaité au volume.
N’oublions pas le débord de toiture qui peut se permettre d’être généreux jusqu’à un mètre-vingt pour bien protéger les façades surtout de la pluie et du soleil. Soignons le débord de toiture ! Traitons-le comme élément à part entière du toit, tout comme la lucarne.

Pour conclure, recherchons pour commencer la simplicité qui a toujours été l’apanage de la véritable architecture.
La pyramide, le Parthénon, la Maison des Sciences de la Terre, sont des architectures à Enseignement, pour bénéficier du bagage nécessaire pour le paysage architectural des tropiques. Si la maçonnerie est dépassée et que désormais l’architecture se trouve dans le « social », faisons une demande raisonnable à nos architectes et à nos ingénieurs, afin que nous préservions la nature, l’environnement, le trafic routier, le paysage pour nous et pour les générations futures.

Manuel MENCE

Architecte

 

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